Face à la raréfaction de la ressource en eau potable et aux enjeux environnementaux croissants, la récupération des eaux de pluie s'impose comme une solution durable et économique. Ce système, aussi appelé Système de Récupération des Eaux Pluviales (SREP) ou Système d'Utilisation des Eaux de Pluie (SERP), permet de collecter, de stocker et de traiter l'eau de pluie pour diverses utilisations domestiques et extérieures.
Dimensionnement d'un système de récupération d'eau de pluie (SERP)
Avant toute installation, un dimensionnement précis du système est crucial. Il s'agit d'évaluer vos besoins et de choisir les composants adaptés à votre contexte.
Évaluation des besoins en eau de pluie
La première étape consiste à déterminer la quantité d'eau nécessaire pour vos différents usages. Considérons les exemples suivants :
- Arrosage du jardin : La consommation dépend de la surface à arroser, du type de végétation et des conditions climatiques. Estimez entre 5 et 15 litres par m² et par semaine en période sèche. Pour un jardin de 50 m², cela représente entre 250 et 750 litres par semaine.
- Toilettes : Un système dual-flush consomme en moyenne 6 litres par chasse d'eau. Pour une famille de 4 personnes, avec 4 chasses par jour, la consommation journalière est de 96 litres (6L x 4 personnes x 4 chasses).
- Lavage de voiture : Un lavage complet consomme environ 100 à 200 litres d'eau. La fréquence de lavage influence le volume total nécessaire.
- Lavage du linge : Une machine à laver moderne consomme entre 40 et 60 litres par cycle. Le nombre de cycles hebdomadaires détermine la quantité d'eau nécessaire.
La pluviométrie annuelle de votre région, la surface de votre toiture (surface de collecte) et son inclinaison sont des facteurs déterminants. Par exemple, une toiture de 120 m² dans une zone recevant 700 mm de pluie par an peut théoriquement fournir environ 84 000 litres d'eau (120m² * 700mm * 1000L/m³). Cependant, des pertes par évaporation et des impuretés doivent être prises en compte. Il existe des logiciels et des outils en ligne pour un calcul précis de vos besoins.
Choix de la surface de collecte (toiture)
La toiture représente la principale surface de collecte. Le choix des matériaux impacte directement la qualité de l'eau récupérée. Voici quelques exemples:
- Tuiles en terre cuite : Matériau poreux, susceptible de libérer des particules fines dans l'eau. Nécessite un système de filtration plus performant.
- Tôles métalliques (acier, zinc) : Surface lisse, facile à nettoyer, moins de contamination par les particules. Cependant, attention aux métaux lourds potentiels.
- Ardoises : Relativement propres, mais peuvent nécessiter un entretien régulier pour prévenir les fuites et la contamination.
- Toitures végétalisées : Excellente filtration naturelle, réduction du ruissellement, mais coût d'installation et d'entretien plus élevés.
L'état de la toiture est primordial. Une toiture endommagée peut laisser passer des contaminants. Une inspection et une réparation éventuelle sont nécessaires avant l'installation du système.
Sélection de la citerne de stockage
La capacité de la citerne doit correspondre à vos besoins en eau. Le choix du matériau (béton, plastique, polyéthylène, acier) dépend de votre budget, des conditions climatiques et de la durée de vie souhaitée. Les citernes enterrées offrent une intégration paysagère discrète et une meilleure régulation thermique, tandis que les citernes aériennes sont plus accessibles pour l'entretien. Les citernes modulaires s’adaptent facilement aux contraintes d'espace et aux futurs besoins. La plupart des citernes de 1000 à 5000 litres sont équipées d'une bonde de trop-plein pour diriger les eaux excédentaires vers un drain ou une autre zone d'écoulement.
Traitement et filtration de l'eau de pluie
L'eau de pluie, même apparemment propre, contient des impuretés. Un système de filtration et de traitement adapté garantit une eau de qualité pour son utilisation.
Polluants dans l'eau de pluie
L'eau de pluie peut contenir des polluants variés selon l'environnement :
- Matières en suspension : feuilles, pollen, poussières, insectes.
- Polluants atmosphériques : oxydes d'azote, dioxyde de soufre, métaux lourds (plomb, cuivre, zinc).
- Produits phytosanitaires : pesticides, herbicides, provenant des zones agricoles avoisinantes.
- Bactéries et virus : présents en faible quantité, mais potentiellement dangereux sans traitement.
Systèmes de filtration et de traitement
Plusieurs étapes de filtration et de traitement peuvent être nécessaires :
- Filtration grossière : grilles, filtres à feuilles pour éliminer les gros débris.
- Filtration fine : filtres à sable, filtres à charbon actif pour éliminer les particules fines et les composés organiques volatils.
- Décantation : permet la sédimentation des particules lourdes.
- Désinfection : traitement UV ou par ajout de chlore pour éliminer les bactéries et les virus. La désinfection est impérative pour toute eau destinée à la consommation humaine.
- Phytoépuration : solution naturelle utilisant des plantes pour filtrer et purifier l'eau. Idéale pour des usages non-potables.
Le choix du système de filtration dépend de l'usage prévu de l'eau et de la qualité de l'eau de pluie collectée. Pour une utilisation domestique, des normes de potabilité doivent être respectées. Un test de qualité de l'eau avant et après traitement est recommandé.
Gestion des surverses
Lors de fortes pluies, la capacité de la citerne peut être dépassée. Il faut prévoir un système de gestion des surverses pour éviter les débordements. Plusieurs solutions existent :
- Débordement vers un réseau d'évacuation pluviale : solution simple, mais l'eau perdue n'est pas récupérée.
- Débordement vers une deuxième citerne : permet de stocker un volume d'eau supplémentaire, utile pour les périodes sèches.
- Infiltration dans le sol : solution écologique qui recharge les nappes phréatiques, mais nécessite une étude de sol préalable. Cette solution est idéale pour un impact environnemental positif important.
Un système d'alerte de niveau d'eau dans la citerne est recommandé pour une gestion optimale des surverses. Il est crucial de prévoir un système capable de gérer des précipitations exceptionnelles.
Installation et maintenance d'un système de récupération d'eau de pluie
Une installation soignée et un entretien régulier sont essentiels pour la longévité et l'efficacité de votre système.
L'installation doit respecter les normes de sécurité en vigueur. L'inclinaison des gouttières doit être suffisante pour un écoulement optimal de l'eau. L'étanchéité de tous les raccordements est primordiale pour éviter les fuites et les risques de contamination. Un professionnel qualifié est recommandé pour l'installation. L'entretien régulier comprend le nettoyage des filtres (au moins une fois par an), l'inspection visuelle de la citerne et de la tuyauterie, et le contrôle du fonctionnement des pompes (si présentes).
Réglementation et aspects légaux
L'installation d'un système de récupération d'eau de pluie est soumise à des réglementations qui varient d'une région à l'autre. Il est impératif de vérifier les réglementations locales avant toute installation.
Normes sanitaires et de sécurité
Les normes sanitaires régissent la qualité de l'eau pour les usages domestiques. Pour l'eau potable, des analyses régulières sont nécessaires. Pour les usages non-potables (arrosage, lavage), des normes de sécurité relatives à la conception et à l'installation du système doivent être respectées. Il est important de se conformer aux normes en vigueur pour assurer la sécurité des personnes et prévenir les risques de contamination.
Aspects assurances
Il est conseillé de vérifier auprès de votre assureur la couverture en cas de dommages liés à l'installation ou au fonctionnement du système de récupération d'eau de pluie. Une assurance adaptée peut être nécessaire pour couvrir les risques de responsabilité civile et les dommages matériels.
Aides financières et incitations
De nombreuses collectivités territoriales proposent des aides financières et des incitations fiscales pour l'installation de systèmes de récupération d'eau de pluie. Ces aides varient selon les régions et les programmes en vigueur. Renseignez-vous auprès de votre mairie ou de votre communauté de communes pour connaître les dispositifs d'aide disponibles dans votre région. Certaines aides peuvent atteindre 40% du coût total de l'installation. Il est conseillé de se renseigner dès le début de votre projet.
L’utilisation des eaux de pluie est une démarche citoyenne responsable, contribuant à la préservation de la ressource en eau et à la réduction de l'impact environnemental. Une bonne planification, une installation professionnelle et un entretien régulier garantissent le succès de votre projet.